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Analyse génétique de la longévité canine : comparaison à celle de l’homme

Analyse génétique de la longévité canine : comparaison à celle de l’homme
© iStock

D'après une conférence de Benoît Hédan (vétérinaire, ingénieur de recherche au CNRS de Rennes) lors du congrès de l'Afvac en décembre 2023.

L’espérance de vie du chien varie considérablement entre les races et de façon générale, elle est inversement proportionnelle à la taille du chien. Ce paramètre varie cependant aussi beaucoup à l’intérieur d’une même race et de nombreux chercheurs tentent d’identifier les bases génétiques de ces différences. D’un point de vue fondamental, les résultats de ces recherches permettront de mieux connaître les mécanismes impliqués dans la longévité des mammifères, en particulier chez l’homme.

En moyenne et toutes races confondues, l’espérance de vie d’un chien se situe entre 11 et 13 ans, soit environ 7 fois inférieure à celle des humains. Il n’en demeure pas moins que multiplier l’âge d’un chien par 7 pour obtenir son équivalent chez l’homme est une approche beaucoup trop simpliste. De nombreux facteurs peuvent en effet modifier l’espérance de vie d’un chien.

Longévité canine et format du chien

Toutes les études le confirment : il existe une nette corrélation entre le format (poids et taille) des chiens et leur longévité. Les petits chiens atteignent l’âge adulte plus vite que les grands chiens mais ils vieillissent ensuite moins rapidement. Il n’est pas rare que certains chiens de petite race atteignent l’âge de 16, voire 18 ans, alors qu'un chien de grande race est considéré comme un « senior » dès l’âge de 8 ans.

La longévité moyenne en fonction du format 1 est évaluée comme suit : 14,2 ans chez les petits chiens (5 à 10 kg), 13,6 ans dans les races moyennes (10 à 20 kg), 12,5 ans chez les grands chiens (20 à 40 kg) et 10,6 ans chez les très grands chiens (> 40 kg).

L’exception à cette règle concerne les chiens nains ou toy, dont l’espérance de vie moyenne est de 13,8 ans, soit plus courte que celle des petits chiens.

Les chiens de race ont tendance à vieillir plus vite que les chiens issus de croisements, qui vivent en moyenne une année de plus que les chiens de race de gabarit équivalent.

Longévité canine et race du chien

Une étude britannique 2 portant sur 30 000 chiens de compagnie décédés entre 2016 et 2020 a analysé l'espérance de vie canine dans 18 races différentes. Les résultats indiquent que le jack russell terrier, le yorkshire terrier, et le border collie ont une espérance de vie significativement supérieure à la moyenne de la population canine.

À l’inverse, le bouledogue français, le bulldog anglais et le carlin figurent en bas du tableau, avec une espérance de vie réduite par rapport aux autres races. Le caractère brachycéphale est donc associé à une réduction de la longévité, sans doute à cause des nombreuses maladies que ce morphotype entraîne.

Les données concernant la longévité des races canines varient d'un pays à l'autre et la sélection génétique appliquée aux races canines depuis des centaines d'années est certainement responsable de ce phénomène. Selon les reproducteurs choisis au sein de la race, certaines lignées bénéficient d’une espérance de vie plus importante que d'autres.

Variabilité individuelle de la longévité canine

Les chiffres énumérés plus haut sont des moyennes et il existe toujours des exceptions : certains petits chiens décèdent avant l’âge de 10 ans ou de très grands chiens dépassent les 15 ans…

Des écarts de 4 ans au sein d’une même race

Grâce au financement par le fonds de recherche SCC-Agria, un travail collaboratif entre le Dr Grégoire Leroy (AgroParisTech) et le Dr Benoît Hédan (Institut de génétique et développement à Rennes) a déjà permis de mettre en évidence la grande variabilité de la longévité intraraciale : l’écart-type est approximativement de 4 ans pour la majorité des races 3.

Une étude en cours

Les supports génétiques de ces différences font actuellement l’objet de recherches approfondies, en se basant sur l’analyse génétique de 20 chiens de 28 races différentes, représentatives de la diversité de la population canine française (voir encadré). Des prélèvements d’ADN sont collectés chez des chiens présentant une longévité médiane ou extrême. Le génotypage des chiens sélectionnés est en cours, ainsi que les analyses statistiques qui devraient permettre d’identifier des régions chromosomiques associées à la longévité dans les races sélectionnées.

Il faut s’attendre à ce que certains des variants génétiques qui seront identifiés soient associés au poids ou à la taille du chien, et donc à la pression de sélection au sein des races. Les chercheurs soupçonnent cependant aussi l’existence de régions chromosomiques non fixées au sein d’une race, mais qui seraient impliquées dans la longévité extrême à l’intérieur de chaque race. Leur présence pourrait ainsi expliquer que certains chiens aient une espérance de vie nettement supérieure à la moyenne de leur race.

Une fois disponibles, les résultats de ces études seront très utilisables par les éleveurs : s’ils le souhaitent, ils pourraient alors orienter la sélection des chiens reproducteurs en fonction du critère de longévité des individus. L’identification de régions chromosomiques associées à une grande longévité pourra aussi fournir des pistes pour rechercher un phénomène similaire chez l’homme.

Plus d’information sur : www.centrale-canine.fr/lofselect/articles/etude-genetique-de-la-longevite-canine


En savoir plus
1. INOUE M. et al., « A current life table and causes of death for insured dogs in Japan », Prev. Vet. Med., 2015, 120, 210-218.
2. LEROY G., « Genetic diversity and breed management in dogs », Life Sci., AgroParisTech, 2008.
3. TENG K.T. et al., « Life tables of annual life expectancy and mortality for companion dogs in the United Kingdom », Sci. Rep., 2022, 12, 6415.

Article rédigé par Pascale Pibot, journaliste-vétérinaire, paru dans Lignées N°59 (juillet 2024)​